Résumé : |
Au cœur de la vie politique des hommes gît un trésor, toujours perdu, que les acteurs de la Révolution américaine avaient nommé « bonheur public », et ceux de la Révolution française « liberté publique ». En certaines circonstances, rares et précaires, ce trésor resurgit grâce à l’action politique menée de concert. Car avec elle se crée un espace public où la liberté peut paraître. Alors un lien se noue, qui rend possible qu’entre les hommes se déploie un monde commun. Tel est le « bien public ». En évoquant ce trésor perdu, Hannah Arendt nous invite à retrouver le sens instituant de l’action politique qui a le monde comme condition et comme fin. C’est dans la mesure où les actions sont politiques que le monde peut être partagé ; et dans la mesure où elles visent un monde commun que ces actions sont proprement politiques. Toute politique s’apprécie au regard du monde qu’elle est susceptible d’instaurer. N’est-ce pas pourtant à l’aliénation du monde que la politique moderne nous condamne au contraire ? Le trésor serait-il pour nous définitivement perdu ? Ce livre montre que, loin de proposer une philosophie politique parmi d’autres, la réflexion arendtienne inaugure une intelligence de l’action politique qui redonne sens au « vivere civile » depuis l’agir pluriel. À l’analyse minutieuse de ce qu’on peut nommer l’acosmisme du monde moderne, cette perte du monde éprouvée aussi bien dans le système totalitaire que dans la prétention technoscientifique de nos sociétés à maîtriser les conditions d’existence, il répond en exposant les vertus et les promesses de l’agir concerté. Étienne Tassin est professeur de philosophie politique à l’université Paris Diderot. Il a, entre autres, publié Un monde commun. Pour une cosmo-politique des conflits (2003) et Le maléfice de la vie à plusieurs. La politique est-elle vouée à l’échec ? (2012). |