Résumé : |
Traduction de l'espagnol par Francine Bertrand González L’apparition, sur la scène de la culture européenne, de cette entité historicogéographique que nous appelons l’Amérique n’est pas due à la découverte qui, dit-on, aurait été faite par Christophe Colomb. Cette façon de concevoir le premier voyage transocéanique du célèbre navigateur n’est qu’une interprétation de ce voyage, fondée sur les connaissances acquises au cours d’années ultérieures à lui. Colomb étant persuadé d’être arrivé sur les littoraux asiatiques, lui attribuer la réalisation d’un fait dont il n’avait jamais eu la moindre idée implique, par conséquent, un paralogisme. Il faut donc accepter cette conviction de Colomb, non pas comme une erreur, mais comme un fait historique et la comprendre comme ayant été le déclencheur du processus idéologique qui se déroula peu à peu à la lumière des données révélées dans des explorations postérieures, obligeant à remplacer cette conviction initiale par la connaissance de l’existence d’un continent jusque-là inconnu et imprévisible. Dans ce livre, Edmundo O’Gorman propose cette thèse et reconstitue le déroulement historique de ce processus, qu’il désigne comme l’invention de l’Amérique. Mais cela ne consiste pas simplement à changer un mot pour un autre ; il s’agit plutôt de comprendre que ce processus éveilla chez l’homme de l’Occident la notion de sa domination de l’univers comme un champ ouvert à la conquête, dans la mesure où cette conquête est le fruit de sa science, de sa technique, de son imagination et de son audace. En somme, avec l’invention de l’Amérique, l’homme moderne fait son premier grand acte de présence. |